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Coralie 04: Capucine monte à bord

Le problème Matthieu est enfin résolu, mais Coralie réalise qu'elle n'a que peu d'amis. Rencontrée dans une soirée "filles", Capucine sera-t-elle sa prochaine relation?

Proposée le 8/10/2016 par Larges Epaules

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Thème: Jeu érotique
Personnages: FF
Lieu: Hôtel
Type: Roman


Je me suis levée moins tard le vendredi, j’ai eu l’occasion de faire un Skype avec ma mère, lui expliquant que j’avais quitté Matthieu, et que j’étais très bien hébergée par des amies. Je n’avais pas mis l’image, pour ne pas lui montrer mon pansement. Ils reviendront cet été, seront deux semaines en août dans une maison qu’ils ont en Bretagne. Cela me fera plaisir d’être avec eux au moins une semaine, je ne les ai pas vus depuis Noël. Mon frère sera là aussi, avec sa femme et ses deux enfants, mais seulement deux-trois jours, car ils vont après quelques jours en Suède dans la famille de sa femme. Cela veut dire que je pourrais inviter quelques amis au moins une semaine. Je réfléchirai à cela et nous fixerons les dates courant juin. Quelle famille !
J’ai ensuite quelques trucs à régler, du genre de ceux qu’on doit faire un jour ouvrable. J’ai encore un peu d’appréhension à sortir seule, mais je me dis que Matthieu travaille à l’autre bout de Paris, et que les chances sont infimes de le croiser. En outre il ne sait pas où je suis, et ne le saura jamais, j’espère.
J’ouvre mes mails professionnels, et je prends connaissance des points urgents, histoire de prendre de l’avance pour lundi. Je mets André en copie d’une réponse d’un mail interne, et une réaction arrive immédiatement :
« Bonjour Coralie,
J’espère que vous allez bien.
Je pensais que nous avions convenu que vous étiez en repos maladie ? Pas de bouquin à terminer ?
A lundi,
André
«
Son mail me fait sourire. Il ne veut pas faire apparaître sur cette messagerie que nous avons un « programme » ce week-end.

Sur mon mail privé
« Salut Coralie,
Olivia me dit que ton état s’améliore.
J’ai monté un petit scénario pour ton déménagement de demain. Ne t’inquiète pas, aucune chance que M ne t’importune, trust me.
A demain 17 heures chez Olivia (qui est maintenant chez toi aussi). Prévois des valises et cartons pour tes affaires.
Affectueusement,
TO
«
Scénario ? Je décide bien entendu de me laisser faire, car s’il y a bien quelqu’un en qui j’ai confiance c’est André. L’organisation cela le connaît.
Le cœur léger, je repars avec Murakami sous le bras. Aomané et Tengo me tiennent en haleine pendant trois heures sur un banc au soleil. J’ai pris ma crème solaire, et je profite de la vie. Dans un autre endroit j’aurais bien bronzé à poil, mais difficile de trouver un lieu en plein Paris... Je me remémore aussi les séances avec André, et les orgasmes fulgurants de ces nuits-là. Particulièrement quand il me racontait ses histoires de massage, soumission et sodomie. Quel pied ! Jean pourrait-il m’amener à un tel niveau ? Nous verrons. De toutes façons, je n’envisage pas de partager ma vie avec quelqu’un qui ne me ferait pas jouir aussi intensément. Et puis ses envies d’expatriation. Je n’ai rien contre sur le principe, mais ma vie est à Paris. Pas trop envie de quitter mon boulot. Où retrouverais-je un patron de cette qualité ?
Pas mal de questions donc. Mais j’ai enfin les clefs de ma vie.
Retour à l’appartement. Je trouve les filles en plein skype avec Isabelle, depuis Tokyo. Il est très tard pour elle, elle revient d’une soirée. Je fais sa connaissance par écrans interposés, et la remercie de me prêter sa chambre, mais lui indique que je serai repartie au plus vite. Pas de problème pour elle, surtout qu’elle annonce ne rentrer qu’un mois plus tard que prévu. Elle nous dit qu’elle a rencontré un garçon japonais dans une soirée il y a quelques semaines. Il est nettement plus petit qu’elle. Il lui a proposé de lui faire découvrir un peu de Japon en été.
- Est-ce que sa bouche t’arrive au-dessus du nombril ou en dessous ? demande Magali.
- Quand nous sommes debout, il me suce très bien les seins, répond Isabelle, et quand nous sommes couchés… (rires)
Je les laisse entre elles, et commence à réfléchir à quel endroit je voudrais vivre. Pas trop loin du boulot de préférence, et certainement près des filles, que je viendrai voir souvent. Studio pour moi seule ou assez grand pour deux ? Au fait, où Jean habite-t-il ? Je ne sais même pas comment il est logé. Je réalise que c’est la deuxième fois que je pense à lui aujourd’hui dans la perspective d’une vie commune. Il me reste donc trois mois pour trouver une solution.
Sandra propose un ciné, elle a repéré une salle pas loin ou on rejoue un Ken Loach à la séance de 22 heures. Olivia et Magali préfèrent une soirée dans leur boîte fétiche, dont le public est assez nettement gay et lesbien. Pourquoi pas un jour, mais je préfère Ken Loach dont je ne connais qu’un film.
Ce printemps est incroyablement doux, mais tout le monde dit qu’on le paiera en été. Nous nous promenons dans les rues, avant et après le ciné, et nous apprenons à mieux nous connaître, car Sandra est celle du trio que je connais le moins.
- Pas trop choquée par les mœurs un peu libres dans la coloc ?
- Certainement pas, ce ne sont pas les mœurs libres qui sont choquantes, mais bien la vulgarité ou la violence, que je n’ai pas retrouvées ici. Et toi, comment vis-tu cela ?
- Je n’ai pas de tendances lesbiennes si c’est ta question, même s’il m’est arrivé parfois de me mélanger aux autres. Rien de tel que qu’un petit orgasme pour faire passer un coup de blues. Surtout avec mes sœurs. Mais c’est devenu exceptionnel, et je préfère les garçons.
- Tu as quelqu’un ces temps-ci ?
- Non pas vraiment. Les deux derniers n’étaient pas très intéressants, je crois que tu sais ce que c’est, et l’avant dernier ne comprenait pas que je préfère les filles de la coloc à lui.
- C’est vrai que vous formez un groupe exceptionnel, l’unité et l’harmonie dans la diversité. Je ne crois pas avoir jamais vu cela.
- Je suis un peu paniquée à cause de la fin de notre histoire. Nous finissons toutes plus ou moins nos études, et le groupe va se dissoudre, inéluctablement. Nous avons vraiment vécu sur une sorte de petit nuage. Cela va certainement me manquer. Je vois bien que tout le monde y pense, mais personne n’ose trop allumer l’incendie.
- Je comprends, même si je ne mesure pas encore la profondeur des liens tissés entre vous.
- A propos, ou en es-tu avec Jean ?
- Je n’en suis nulle part, même s’il m’a laissé comprendre qu’il se verrait bien avec moi. J’ai surtout besoin de me reconstruire d’abord, avant d’envisager quoi que ce soit d’autre.
- Je ne sais pas si tu l’as appris ou non, mais j’ai longtemps été raide dingue de Jean. En fait depuis ce jour de mes onze ans où je l’ai vu chez lui à l’occasion de l’anniversaire d’Olivia, qui était dans ma classe. Un vrai coup de foudre. J’ai très longtemps dormi avec une photo de lui sous mon oreiller. Il a mis un temps fou à se déclarer et on est sortis ensemble pendant 1 an environ, puis il m’a dit que notre relation n’était pas ce qu’il recherchait. J’avais dix-huit ans et lui vingt. J’ai mis des années à encaisser le coup, car je me voyais déjà mariée à lui, avec de nombreux enfants. Maintenant cela va nettement mieux, mais je préfère le voir le moins possible, c’est pour cela qu’il ne vient pas trop à la coloc, et surtout qu’il n’y habite pas. Quand le choix s’est posé, le père d’Olivia a dit qu’il ne voulait pas casser le quatuor magique, et que j’avais ma place bien plus que Jean dans l’appartement. Il a habité chez ses parents jusqu’à la fin de ses études et partage maintenant un appartement avec un pote, mais je crois qu’ils devraient le quitter bientôt.
- Je suis navrée de tout cela, j’espère que cela ne te fait pas trop de mal que je voie Jean.
- Non cela ne me fait pas de mal, car je sais que plus rien ne se passera entre Jean et moi. J’espère rencontrer un prince charmant dont je ne tomberai pas trop vite amoureuse.
- Pourquoi ?
- Parce que la séparation d’avec Jean m’a fait beaucoup souffrir. Enormément souffrir.
Nous rentrons à la coloc, vide, Olivia et Magali devant s’éclater sur le dance floor.
Fin du tome 1 de 1Q84. Heureusement les autres sont sur l’étagère. J’en ai appris un peu plus aujourd’hui sur tout ce petit monde, et l’affaire passée entre Sandra et Jean me gêne. Je me pose des questions au sujet de Jean. On ne peut pas dire qu’il y ait eu coup de foudre. Certes, il est très gentil et attentionné avec moi, mais je ne crois pas qu’il me fera vibrer, ni dans la vie ni au lit. Et j’ai justement envie et besoin de vibrer. Je suis jeune, libérée, autonome. Attendons la flamme quelques temps encore, avant de choisir des pantoufles par dépit. Je me dis aussi que je pense au sexe de plus en plus souvent. L’initiation d’André a été fabuleuse, mais je ne me vois pas lui réclamer une leçon par semaine. Quoique ?
Je suis réveillée le samedi par des éclats de rire dans la cuisine. J’ai soudain une crise d’angoisse car je réalise que c’est aujourd’hui que je vais récupérer mes affaires, et peut-être devoir affronter Matthieu, même en public. Cette idée me coupe le souffle, et j’éclate en sanglot. Olivia frappe à la porte, et me console directement en me disant que cela ne se passera pas comme cela, car son père et elle ont bien préparé les choses. Ses mains de médecin me font un massage apaisant et je suis rapidement en état de me lever. Les filles partagent le petit déjeuner, Sandra au saut du lit, Olivia et Magali revenant de soirée. Ambiance décontractée ou les filles racontent leurs aventures nocturnes, avec une drôlerie certaine. Vivent les gens qui ne se prennent pas trop au sérieux.
Arrive 17 heures. J’ai rassemblé assez de valises et sacs pour pouvoir emmener mes affaires personnelles, principalement des vêtements et des livres. J’ai décidé de ne rien emmener des affaires que Matthieu et moi avions achetées en commun, je n’ai pas envie qu’elles me le rappellent à chaque occasion.
Les trois filles sont là, même si Magali semble encore avoir une belle gueule de bois. Olivia est pleine d’énergie, mais elle a l’habitude des nuits courtes. Sandra est zen, comme souvent. Arrivent André et un ami, chacun leur voiture, cela devrait être suffisant pour le transport. Jean ne viendra pas.
C’est la première fois que je vois André depuis notre escapade andalouse. Je lui serre la main, car il est encore mon patron. Son contact me donne de la force pour ne pas craquer. J’espère ne pas nous trahir en présence de ses enfants, et je suis donc très attentive.
André nous explique le plan. Coralie reste dans une voiture avec Sandra, le temps que la troupe monte chez elle et s’assure de la présence de Matthieu. S’il est absent, Sandra est prévenue et on emballe. S’il est présent, André emmène Matthieu, et Sandra ne monte qu’au signal SMS. Compris tout le monde ?
La troupe arrive chez Coralie, et André gare sa voiture dans la rue d’à côté, pour éviter le contact visuel. Sandra et Coralie attendent donc les instructions. Malgré tout ce préparatif, Coralie est nerveuse.
André sonne à la porte avant d’entrer, et sans réponse, utilise la clef. Le groupe tombe sur une situation de chaos, canettes, bouteilles, cendrier plein, carton à Pizza. Cela sent le sanglier. Matthieu dort sur le divan, devant la télé allumée.
André réveille Matthieu et lui demande de s’habiller et de le suivre. Il enfile un pantalon et met ses chaussures.
- Coralie est là ?
- Non elle n’est pas là car elle est encore traumatisée par ton comportement de voyou. Nous venons chercher ses affaires. Ne crains rien, nous ne ferons pas de désordre et ne prendrons rien qui n’appartient pas strictement à Coralie. Nous partons maintenant, je t’emmène boire un verre d’eau, cela devrait te changer. Tu laisses tes papiers ici, et tu me confies ton trousseau de clefs, je te les rends dans une heure si tu fais ce que je te dis.
- Où allons-nous ?
- Tu verras bien, mais il ne t’arrivera rien.
André tient un petit dossier en main, et quitte l’appartement derrière Matthieu. Magali envoie deux minutes après un sms à Coralie « tu peux venir, M n’est pas là ». Elle découvre ses amis prêts à l’action valises et cartons déjà ouverts. Elle est submergée par l’émotion, et aussi gênée par le chaos de l’appart.
- Je suis désolée de vous faire voir toute cette merde, je suis gênée.
- Pas de raison ma belle, c’est pas toi qui a bu.
Coralie trie alors ses affaires, principalement des bouquins, mais aussi son ordi. Les filles se chargent des vêtements, produits de beauté. Tout cela ne prendra pas beaucoup de temps et l’ami d’André descend les premiers cartons.
Pendant ce temps, André et Matthieu arrivent à un bistrot, et commandent deux eaux pétillantes.
- J’ai simplement quelques petites choses à te dire. A partir de maintenant, tu vas devant moi prendre l’engagement solennel de ne plus essayer de contacter Coralie, de la sortir de ta vie comme elle t’a déjà sorti de la sienne. Ton comportement d’ivrogne et de voyou est inexcusable.
- De quel droit vous mêlez-vous de mes affaires ?
- Du droit que je m’arroge de protéger les gens plus faibles, à quelque point de vue que ce soit. La violence est inacceptable, d’autant plus sur une femme.
- Pourquoi m’avez-vous pris mes clefs ?
- Pour être certain que tu ne fasses pas de conneries. Je te les rends dans maximum 30 minutes quand toutes les affaires auront été embarquées.
- Et si je ne vous obéis pas, allez-vous m’envoyer vos tueurs ?
- Ton humour grinçant est déplacé. Si tu ne respectes pas cet engagement, j’utiliserai ce constat médical lors du dépôt de plainte pour maltraitance. Elle a passé deux jours à l’hôpital dans un état de crise aigüe. Je l’ai incitée à déposer plainte directement, mais Coralie a tellement peur de se retrouver devant son bourreau, même au tribunal, qu’elle a préféré ne pas le faire. Sache que tu aurais pu être mis en examen, et sans doute en prison. Cela n’aurait pas fait plaisir à Mr Lebon, le PDG de ta boîte et par ailleurs un de mes bons copains de promotion, d’apprendre ton comportement. Je n’aurais certainement pas manqué de l’informer, et je me souviens d’un garçon très à cheval sur les principes. Donc, si d’une manière ou d’une autre, tu essayes de contacter Coralie, si tu ne te comportes pas en gentleman dans la liquidation de vos biens communs, nous déposons cette plainte, et nous avons deux ans pour le faire, tu te retrouves en cabane, et sans boulot, avec peu d’espoir d’en retrouver en France, car je ne manquerai pas de te pourchasser, sois en certain. Tu as des questions ?
Matthieu semble hébété par ce qu’il vient d’entendre. André pense qu’il est sous le choc, mais sans doute aussi encore sous l’effet de la drogue ou de l’alcool. Il y a aussi que les espoirs de revoir Coralie, cette fille qu’il aime, disparaissent.
- Donc Matthieu, quel est ta conclusion ?
- Je regrette profondément ce que j’ai fait, j’ai eu comme un coup de folie, et je m’engage à ne plus jamais contacter Coralie.
- Je pense que tu n’es pas un mauvais bougre, mais tu as un problème avec l’alcool dont tu devrais pouvoir sortir en te soignant convenablement. Je te donne ma carte, et mon email personnel est le seul moyen dont tu disposes désormais, si tu devais régler avec Coralie l’un ou l’autre détail, comme par exemple la reprise du loyer de l’appartement que vous aviez en commun. Je te laisse libre de présenter tes excuses écrites à Coralie, mais elles devront passer par moi. C’est clair ?
- Oui, c’est clair.
- Nous attendons donc quelques minutes maintenant, et tu ne bouges pas. Une autre eau ?
- Non merci.
Les deux hommes n’ont plus rien à se dire. Matthieu est au bord des larmes, et André semble parfaitement calme et serein, comme toujours. Au bout de 15 minutes, André reçoit un texto « tout est emballé et chargé, opération terminée »
André se lève et salue Matthieu, en lui rendant ses clefs.
- Tu verras, tout va s’arranger, mais fais-toi soigner, et essaye de compenser tes frustrations.
Il se dirige alors vers sa voiture, où il trouve Coralie en pleurs, et Sandra essayant de la consoler.
- Tout est fini Coralie, ce type ne t’importunera plus jamais.
- Merci André, mais comment avez-vous fait ?
- Je lui ai montré ce document. C’est un constat médical, qui atteste que tu as été victime de violences. Il a été établi par Olivia, et signé par son chef de service. Je lui ai indiqué que tu n’hésiterais pas à porter plainte, ce qui lui vaudrait de sérieux ennuis avec la justice. Ce document est parfaitement valable et légal, et a une validité de deux ans. Je lui aussi indiqué que le président de sa boîte était un copain de promo, ce qui est faux, et que je n’hésiterais pas un instant à l’informer des agissements de son employé, ce qui est vrai. Donc, chômage, et possiblement prison. Il a mis un peu de temps, mais il a compris.
Coralie est hébétée, au milieu de toutes ces émotions. Qu’aurait-elle fait sans André ? Elle ne peut pas s’empêcher de pleurer encore, la pression se relâche enfin. Elle pleure à chaudes larmes en présence des autres, qui comprennent qu’il n’y a rien à dire.
- André, je voudrais vous dire merci pour tout cela, et pour le reste.
- J’accepte tes remerciements, mais ils n’étaient pas nécessaires.
Nous débarquons les dernières valises et quelques cartons, et débarquons à la coloc ou les filles avaient déjà commencé à ranger mes vêtements.
- Merci pour tout mais j’ai encore une journée pour m’organiser. Je voudrais toutes et tous vous remercier et vous dire…
Olivia interrompt Coralie :
- Ok on va te laisser continuer, mais tu dois arrêter de remercier tout le monde à tout bout de champ, cela nous gêne un peu et puis on finira par te surnommer « Coramerci » ou alors….une idée les autres ?
- Coracias ou alors…
- Corathanks, mais c’est pas le premier choix, on confondrait avec un char d’assaut !
Rires généraux….
- Bon les enfants, c’est pas tout d’aider Coralie, mais nous sommes attendus à la maison par Monique pour un repas. J’ai cru comprendre que les absents auraient tort !
Aïe ! Coralie appréhende un peu de se trouver en présence de Monique, elle se dit qu’il lui faudra être doublement attentive à ne pas se trahir.
La soirée est joyeuse comme d’habitude, conviviale toujours, sérieuse et intéressante souvent, car il n’y a que des têtes bien faites autour de la table.
Au moment de nous quitter je tends la main à André, qui me dit que ce traitement-là est réservé à la semaine, mais qu’il pense avoir mérité un bisou aujourd’hui…
Sa remarque me fait rire, et je lui donne ces bisous, en respirant son odeur qui m’évoque bien des choses. Je remercie Monique chaleureusement pour ce repas et cette soirée. Elle aussi, bien entendu est charmante, même si j’ai cru percevoir quelques soupçons. Aurait-elle deviné ? Elle est psychiatre, et donc sans doute sensible à toutes les vibrations.
La soirée continue un peu entre filles, et nous parlons principalement d’Isabelle. Si sa relation avec son beau japonais continue, elle ira dans doute le rejoindre là-bas, ce qui signifie beaucoup moins de relations avec elle. Tout le monde a en tête le probable éclatement du groupe, mais personne ne l’évoque tout haut, car chacune craint le choc émotionnel. Ce groupe est incroyablement soudé, solidaire, et pourtant tellement bigarré.
Lendemain dimanche, déballage et rangement, traitement de quelques mails secondaires (malgré l’interdiction du boss). Semaine quasi entière au bureau, je vais donc pouvoir accepter la sortie avec Jean. S’il n’y a pas plus de déclic que la première fois, je lui dirai qu’il ne doit pas trop espérer de moi dans l’immédiat. J’essaye de me rendre utile à la coloc, mais je ne vois rien de particulier sauf un fond de vaisselle vite expédié. Le dimanche n’est pas idéal pour les courses dans le quartier. Il fait toujours superbe quoiqu’un peu orageux, et je me délecte de retrouver Aomamé et Tengo dans le tome II de 1Q84.
En enfilant mon bikini (presque plus de traces de coups), je repense à la première soirée passée ici. C’était il y a deux semaines maintenant, mais cela me paraît tellement loin déjà. Je repense à Capucine, qui avait proposé de me guider à Avignon.
- Allo Capucine, c’est Coralie à l’appareil, on s’est vues à la coloc des filles, tu te souviens ?
- Oui bien entendu, comment vas-tu ?
- Pas mal, mais c’est un peu compliqué à expliquer au téléphone, et toi tout roule ?
- Oui, mais je suis un peu en galère. Aussi difficile par téléphone !
- Tu fais quelque chose cet après-midi ? Tu as envie qu’on se voie ?
- Chouette idée. A quoi tu penses ?
- Promenade au soleil, terrasse, papote…
- RV au Canal Saint Martin, ok pour toi ?
- A tout de suite.
Je n’ai pas d’idée de ce que peut être la galère de Capucine, mais elle n’avait pas non plus l’air d’être désespérée. Nous verrons bien.
Nous nous retrouvons au Canal, et commençons par une promenade dans le quartier, que je connais mal. C’est très calme et détendu malgré le grand nombre de personnes venues prendre le soleil.
- Tu habites dans le coin ?
- Oui, une petite chambre, mais je ne vais pas t’y inviter, c’est vraiment miteux. Magali m’a dit l’autre soir que tu étais à la coloc ?
- En effet, j’ai quitté mon mec, et je suis là-bas pour quelques mois, le temps de trouver quelque chose.
- Oui, elle m’a raconté aussi que la séparation n’avait pas été très facile… Je suppose que c’est la dernière trace, sur ton visage ?
- En effet, mais le reste est arrangé, et je ne devrais plus avoir d’emmerdements de la part de ce salaud.
- Tu l’aimes encore ?
- Ecoute, j’ai des regrets maintenant, pour tout l’investissement que j’avais mis dans mon couple, et c’est pas drôle d’en arriver là. Par contre, je me suis rendu compte qu’il ne m’aurait jamais rendu heureuse. Donc je suis passée à autre chose.
- Il t’aurait fallu quoi pour être heureuse ?
- Que nous aimions les mêmes choses, et aussi qu’il me fasse vibrer, dans la vie et au lit. On s’est mis ensemble trop jeunes, et on a pas évolué de la même manière. Parle-moi de ta galère.
- Eh bien c’est très simple. Je m’investis à fond dans ma carrière de comédienne depuis 5 ans maintenant, et j’en suis encore à mendier les petits rôles dans des productions pourries. J’en ai marre de n’avoir jamais de fric, et en plus je viens d’apprendre qu’on détruit notre immeuble dans trois mois, et que je suis expulsée à la fin de l’été.
- Tu n’as pas un statut d’intermittente ?
- Si, mais pour toucher les Assedic, il faut justifier d’avoir un minimum d’heures payées sur un an, et je suis loin de les avoir. Les heures bénévoles ne comptent pas, et Dieu sait que j’en fais, et le reste est largement insuffisant. En plus, pour ajouter au tableau j’avais un rôle dans un petit spectacle prévu pour Avignon, mais personne et surtout pas le producteur ne veut ou ne peut mettre un euro pour payer l’acompte de la salle. C’est donc foireux, et ce truc tombera à l’eau comme les autres. Je suis un peu découragée, pour tout te dire…
- Je comprends bien. Je m’arrêterais bien prendre un verre, j’ai un peu soif,
- La seule chose que j’ai les moyens de boire, c’est l’eau du canal…
- Je t’invite, et je ne sais pas pourquoi, mais j’ai envie de t’aider, même si je ne sais pas encore trop comment.
En fait, je savais très bien pourquoi. J’ai de l’empathie pour Capucine, que je trouve touchante et sympathique, même si elle est en tous points très différente de moi. Et puis il y a un début d’attirance, même si piercings et tatouage ne sont pas trop mon truc. Serais-je en train de virer de bord ? Pourquoi un conditionnel, j’ai déjà goûté à pas mal de choses.
La conversation tombe sur sa passion pour le spectacle, et elle parvient facilement à me convaincre que c’est la seule chose qui lui convienne. Je ne l’ai pas vue jouer, mais c’est déjà une évidence pour moi. Elle me dit aussi qu’elle est seule au monde ou à peu près, sa famille n’ayant jamais accepté ni ses aspirations artistiques, ni surtout ses préférences sexuelles. Elle n’a plus eu contact depuis cinq ans maintenant.
- Capucine, je n’ai pas trop de culture artistique, mais j’ai fort envie que tu m’inities. Tu ferais cela pour moi ?
- Bien entendu, surtout que j’ai vraiment envie qu’on devienne amies.
Aucun sous-entendu dans la phrase, et cela me plait
- Moi aussi j’en ai envie. Il me vient quelques idées pour t’aider. Je pourrais te prêter 1000 euros tout de suite. Cela t’aiderait-il ?
- Wow, bien sûr, mais c’est beaucoup trop. Tu sais, je vis comme un oiseau, avec moins de 250 euros par mois, car on ne paie pas de loyer dans notre ruine. Juste les charges.
- « On » ?
- Je partage une chambre avec un copain homo, mais je crois qu’il va s’en aller, il a maintenant une relation stable avec un gars qui a un appartement. Je préfèrerais si c’est possible que tu m’aides quatre mois à 250 euros, tu penses que c’est possible ?
- Naturellement. Pourquoi pas tout tout de suite ?
- Parce que par exemple je n’ai pas de compte en banque, et je n’ai pas envie de perdre ou me faire voler tout cet argent. Ensuite je pourrais être tentée par des choses inutiles, comme un nouveau tatouage, ou pire encore de la drogue, dont je ne suis plus dépendante maintenant. Tu fumes toi ?
- Non pas vraiment, j’ai dû essayer trois fois à vingt ans, mais cela ne me dit rien.
- Tu fais bien, c’est une saloperie.
- Capucine, voici ce qu’on va faire. Je vais te passer 400€ maintenant, et ce serait sans doute utile que tu t’achètes quelques vêtements présentables pour la deuxième partie du plan ?
- Super, tu as raison. C’est quoi ton plan ?
- Je pense que de trouver du boulot, dans n’importe quel domaine, est une question d’aptitude et de chance bien entendu, mais aussi de relations. Nous avons eu en début d’année la fête de notre boîte, qui était un dîner dans une salle de spectacle. Nous étions une centaine avec les conjoints et le concept était très sympa, les serveurs/serveuses sont des comédiens, et toute la soirée était interactive avec participation des spectateurs. On s’est bien amusés et je sais que ma boîte fait cela chaque année, avec la même société d’évènementiel. J’ai eu l’occasion de parler au patron, qui est très lié à la personne des ressources humaines chez nous qui organise cela. Je m’entends très bien avec elle, et cela ne devrait pas poser de problème de t’obtenir un rendez-vous. Je te vois assez bien dans l’un ou l’autre rôle. On fait ça ?
- Bien entendu, c’est super. Tu me touches beaucoup. Pourquoi fais-tu tout cela pour moi Coralie ?
- Parce que nous sommes amies ! J’ai moi aussi pas mal profité de l’aide des autres quand j’en avais besoin, et c’est mon tour de renvoyer l’ascenseur…
- Merci mille fois
Capucine est émue, et moi aussi, par contagion. Incroyable ce que j’ai pleuré ces derniers temps…
Nous allons au distributeur et je remets les €400 à Capucine.
- Je te rends cet argent, dès que possible.
- Je ne suis pas pressée. Je suis certaine que les choses vont s’arranger pour toi rapidement.
- On se revoit quand ?
- Ecoute, je suis assez libre ces temps-ci. Ce ne serait pas mal que tu passes à la coloc un soir de cette semaine pour me montrer tes achats. J’ai sans doute aussi l’une ou l’autre pièce qui te plairait.
- Mardi ou mercredi ?
- Plutôt mardi, j’ai un truc mercredi soir.
- J’ai un peu envie de t’embrasser, je peux ?
- Oui, moi aussi, mais je ne me sens pas encore assez libérée pour embrasser une fille en rue. On va trouver une impasse par là.
Et me voici donc comme une adolescente en train d’embrasser à pleine bouche une lesbienne. C’est très doux, et son piercing sur la langue procure une sensation particulière. Je ne peux pas m’empêcher de lui caresser les seins, et je sens qu’il y a là d’autres piercings.
- Capu, on va en rester là aujourd’hui, mais j’ai beaucoup aimé ce baiser. J’espère qu’il y en aura d’autres.
- Coralie, merci mille fois pour tout, tu me sors de la mouise.
- Olivia m’a dit qu’il ne fallait pas trop remercier, c’est un de mes gros défauts, mais t’aider me procure aussi de la satisfaction. A mardi ma belle !
- A mardi Coralie chérie !
Le trajet de retour me donne l’occasion de réfléchir à beaucoup de choses, dont cette attirance nouvelle pour les filles. Il y a un mois je n’étais pas attirée par le corps de femmes, mais cela a fort changé. Je ne pense pas pour autant être une vraie lesbienne, mais je dois avouer tirer de plus en plus de plaisir de ces relations.

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Commentaires de l'histoire :

Aziz
Je suis sous le Charme de cette coralie, de cette histoire et de tous ces rebondissements.
Posté le 11/10/2016


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